CITY-DT concernant un reportage de CityNews (le point sur l’explosion de Mississauga)

COMITÉ DÉCIDEUR ANGLOPHONE
Décision CCNR 16/17-1173
2018 CCNR 1
23 janvier 2018
A. Noël (présidente), D. Braun, R, Hutson, K. Leavins, A. LeBlanc, T. Rajan

 

LES FAITS

Le 30 décembre 2016 à 17 h 59 au cours de son bulletin de nouvelles CityNews, CITY-DT a fourni une mise à jour sur le récit d’une explosion survenue en juin 2016 dans une résidence de Mississauga. Le reportage comprenait des extraits de la conférence de presse donnée ce jour-là, dans laquelle les enquêteurs de la police et du service des incendies élucidaient les causes de l’explosion. La cause en était attribuée à un double suicide, réalisé par la déconnexion des conduites de gaz naturel pour que le gaz puisse envahir la maison jusqu’à ce qu’il prenne feu. Le reportage du 30 décembre signalait que 37 maisons du voisinage avaient été endommagées par la déflagration, et que, six mois plus tard, certaines familles n’avaient toujours pas réintégré leur domicile.

Le reportage donnait le nom et des photos du couple habitant la maison impliquée et racontait que des lettres écrites à la main avaient été projetées dans les alentours sous l’impact de la déflagration. La journaliste a rapporté [traduction]: « Beaucoup de ces lettres laissaient entendre que le couple traversait des moments difficiles au point de vue financier et émotionnel, et quelques notes manuscrites suppliaient Dieu d’aider à payer les factures ». Sur les photos de ces lettres diffusées en gros plan, on pouvait lire des passages évoquant la santé du couple, ses embarras financiers et ses appels au secours. (Une transcription et la description complète du reportage figurent dans l’annexe A, en anglais seulement.)

Dans une lettre datée du 23 janvier 2017, un téléspectateur s’est plaint que CITY-DT avait violé la vie privée du couple en exhibant les lettres lors de cette émission. Il a mentionné avoir porté plainte auprès d’autres autorités à propos des reportages diffusés initialement en juin 2016, sans jamais recevoir de réponse satisfaisante. À son avis, CITY n’aurait pas dû être en possession de ces lettres, et encore moins en tirer profit en les incluant dans son bulletin de nouvelles.

CITY-DT a répondu au plaignant le 28 février, en invoquant [traduction] un « intérêt supérieur en jeu » puisque ces lettres [traduction] « permettaient de se faire une idée sur les propriétaires de la maison considérés comme principaux suspects dans la cause de l’explosion. Cette information répondait au besoin légitime et justifié du public de savoir qui étaient ces gens et quelles étaient les causes de l’explosion ». CITY a fait observer que le reportage était « un acte de journalisme et non pas une activité commerciale » dont il aurait tiré profit. Le plaignant a déposé une demande de décision le 7 mars, dans laquelle il cherche à savoir si les radiodiffuseurs [traduction] « ont le droit d’empiéter sur la vie privée sans restriction aucune » et d’exhiber du courrier provenant d’une scène de crime, du moment qu’ils estiment que l’intérêt public le justifie. (La correspondance complète figure dans l’annexe B, en anglais seulement.)

LA DÉCISION

Le comité décideur anglophone a étudié la plainte à la lumière de l’article 5.0 (Respect) du Code de déontologie journalistique de l’Association des services de nouvelles numériques et radiotélévisées du Canada (RTDNA) qui se lit comme suit :

Les journalistes se montrent toujours respectueux et tiennent compte en tout temps de la pertinence d’un récit pour l’intérêt public.

[...]

5.5       Nous n’empiéterons pas sur la vie privée d’une personne à moins qu’il y ait un intérêt supérieur en jeu.

Les membres du comité décideur ont lu toute la correspondance afférente et ont visionné le reportage en question. Le comité conclut que CITY-DT n’a pas violé la disposition du code citées ci-dessus.

L’explosion d’une résidence à Mississauga en juin 2016 est un événement tragique. Des personnes sont décédées. En outre, de nombreuses maisons ont été endommagées ou détruites, et des familles se sont retrouvées à la rue. Tout un quartier s’interrogeait sur la nature de l’accident. Un reportage sur cet événement était très certainement justifié.

Le bulletin du 30 décembre a livré des indications importantes qui permettent de faire la lumière sur les causes de l’explosion. Le directeur du service des incendies a déclaré que l’enquête permettait de conclure de façon définitive à un double suicide.

Sous l’impact, des lettres écrites par les victimes ont été projetées aux alentours. Ces lettres indiquent que le couple éprouvait des difficultés de santé et d’argent et cherchait désespérément de l’aide. Quelques-unes de ces lettres ont été montrées à l’écran au bulletin de nouvelles du 30 décembre.

L’article 5 exige qu’un intérêt supérieur soit en jeu pour justifier un empiètement sur la vie privée. Le comité estime qu’il y avait bel et bien un intérêt supérieur en jeu. Au moment de l’émission, 33 foyers étaient toujours déplacés et beaucoup d’autres avaient été touchés par l’explosion. Tous ces gens avaient le droit de savoir pourquoi elle s’était produite. Les lettres ont fourni de précieux renseignements sur l’état d’esprit des personnes qui ont été à l’origine de toute cette destruction.

Étant donné l’intérêt supérieur en jeu, le comité n’a pas à se demander si les papiers personnels étaient de nature privée.

Au vu de ce qui précède, le comité conclut qu’il n’y a pas eu violation de l’article 5 du Code de déontologie journalistique de l’ASNNR.

Réceptivité du télédiffuseur

Dans toutes les décisions rendues par le CCNR, ses comités évaluent dans quelle mesure le radiodiffuseur s’est montré réceptif envers le plaignant. Bien que le radiodiffuseur ne soit certes pas obligé de partager l’opinion du plaignant, sa réponse doit être courtoise, réfléchie et complète. Dans la présente affaire, CITY-DT a répondu au plaignant en citant ce qu’il croyait être les dispositions pertinentes du code et en expliquant pourquoi il estimait ne pas y avoir contrevenu. Ce télédiffuseur ayant rempli son obligation de se montrer réceptif, il n’y a pas lieu d’en exiger davantage de sa part.

La présente décision devient un document public dès sa publication par le Conseil canadien des normes de la radiotélévision.

Annexe A

On December 30, 2016 at 5:59 pm during CityNews, CITY-DT provided an update on a story about a June 2016 house explosion in Mississauga.

The banner at the bottom of the screen reads “Breaking News” and “Explosion ruled a double suicide”

[aerial view of destroyed home]

Shauna Hunt:           An entire neighbourhood destroyed by a deadly explosion.  After a six-month mystery as to what caused the blast here on Hickory Drive, we now have answers.

[street level scene of people walking near blast site]

Hunt (at Peel Police Station):       Welcome back to CityNews.  We now know what caused a deadly house explosion on that June afternoon in Mississauga.  Fire and police investigators, uh, revealed their findings here at Peel Police Headquarters just about an hour and a half ago.  And they believe that the blast was set off as part of a double suicide.

clip of press conference by Kevin Pahor, Office of the Fire Marshal of Ont:        We, uh, looked at, uh, four scenarios, double suicide being one of them.  And, uh, we investigated the three others and, uh, through the process of elimination we are able to rule out those other three scenarios and are left with the double suicide. [footage of investigators combing through debris]  We’ve had witness indicate that, uh, they were able to smell the gas, um, approximately an hour and a half prior to the explosion.  And, uh, any individual that was inside the residence, the two individuals would’ve easily been able to smell the gas and had they wanted to exit, would have had that opportunity.

Officer at press conference:        Now the cause of the explosion was the intentional disconnect of the natural gas piping in two locations from the hot water tank.  This allowed natural gas to free-flow into the basement of the residence until it entered this explosive range and was thus ignited, causing the explosion.

Hunt:  Dozens of families remain homeless six months later.  Tonight we take a look back at the damage caused and the couple killed in this explosion.

[footage of people around blast site & fire & smoke rising from debris]

Hunt:  When [####] Hickory Drive exploded six months ago, debris came raining down on the neighbourhood.  A roof landed on a roadway a couple of hundred metres away.  Thirty-seven homes were damaged.  Thirty-three severely.  In fact, those families are still displaced.  Windows in nearby condo buildings were blown out and garage doors were bent out of shape.

Mississauga Mayor Bonnie Crombie at press conference:  We’ve been working with the residents.  There are still 33 families that are displaced, whose homes have now been demolished and there will be news posted on the Peel Police bulletin board.  So there will be information and we are setting another community meeting so that all the residents can come together and, once again, we can answer all their questions more fully.

[aerial view of damage]

Hunt:  [R. N.] and [D. P.] were the married couple who lived at the blast site.  Both were killed.  When the explosion happened, hand-written letters that resembled pages from a diary were strewn across the neighbourhood.

[close-up of photo of hands holding a paper on which is written:

[???] the house is a mess.

I stopped vacumming [sic] when the power went off in the upstairs bathroom.

I stopped ironing a few months ago when I could not stand up for long periods of time.

I stopped dusting when I had to deal with my vertigo (the last year it began and now I have it often).  I just stopped caring as much because I had no energy to clean the [word covered by person’s fingers] yard of weeds and trim the [word covered by person’s fingers] trees and keep it nice.  Every time I went outside I became ill for days and my chest becomes so tight, can’t [word covered by person’s fingers] in the backyard.  I tried to make a [?] garden, but my health failed me.  I could not pull the weeds out of the brick area [rest of letter covered by CITY “Breaking News” banner at bottom]

Hunt:  Many of those letters suggested the couple may have been struggling financially and emotionally.

[another close-up photo of another letter:

Dear God,

As of next week everything will fall apart for us.  We owe mortgage company

house taxes

water bill

gas bill

hydro bill

TV bill next 7 day [illegible]

Our outside looks like crap, unkept lawn, overgrown plants, bricks on wall cracking, weed growing through concert [sic, concrete].  The upstairs bathroom electricity is off, the back bathroom shower has [remaining words covered].

Hunt:  With hand-written notes pleading to God for help paying bills.

[another close-up photo of another letter:

Dear God,

You know that my health and my husband’s health are in poor condition.

We ask that you help us, we have trusted you with all our lives and possessions because everything belongs to you; including us.

[word covered by person’s fingers] put all our faith and trust in [word covered by person’s fingers]

Only you can save us from man and his [word covered by person’s fingers].

Man is made by God and God makes [word covered by person’s fingers] obey Him.

We your servents [sic] have obeyed [words covered by news banner] helping the poor [words covered by news banner] we are in [words covered by news banner].

[photos of man & woman, presumably the homeowners]

Hunt:  Neighbours describe the couple as reclusive and said the property was often unkept.  CityNews’s learned that [Mr. N.] was convicted of second-degree murder in 1982 and spent many years in prison [photo of younger Mr. N.].

[exterior of houses and structure covered with tarps]

Hunt:  A walk through the neighbourhood six months later, we found some homes are under construction.  Others are still boarded up.  [scenes of houses with mangled garage doors, workers on a roof]

Crombie at press conference:     There are a lot of issues that remain.  Many of them are with, with their insurance companies and the utility companies as well, but we want to thank all those organizations that came together to make this a little easier for those residents that were displaced, who have just been six months out of their homes.

Annexe B

Cliquer ici pour le PDF.