Les reportages sur le séjour « illégal » au Canada d’un demandeur de statut de réfugié refusé étaient exacts, déclare le Conseil canadien des normes de la radiotélévision

Ottawa, le 18 septembre 2008 - Le Conseil canadien des normes de la radiotélévision (CCNR) rendait publique aujourd’hui sa décision concernant deux reportages de nouvelles distincts au sujet d’une ordonnance d’expulsion qui ont été diffusés par Global dans le cadre de son téléjournal national, Global National et par CTV de la Colombie-Britannique (CIVT-TV) dans le cadre de son téléjournal régional, CTV News at Six, le 9 janvier 2008 dans les deux cas. Un groupe qui se nomme Media Watch s’est plaint au sujet du [traduction] « manque d’exactitude et d’intégralité dans la couverture médiatique faite récemment » d’un cas en particulier concernant un réfugié. Les plaignants ont ajouté que les télédiffuseurs ont [traduction] « faussement rapporté que [le demandeur de statut de réfugié] “ est entré au Canada illégalement ” ou qu’il “ était en situation illégale ” au Canada avant qu’on lui indique sa première date d’expulsion. » Ayant conclu que les reportages n’ont pas violé les normes quant à l’exactitude des nouvelles du Code de déontologie de l’ACRet du Code de déontologie (journalistique) de l’ACDIRT, le CCNR n’était pas d’accord.

Les deux reportages concernaient Laibar Singh, lequel a demandé au Canada de lui accorder le statut de réfugié en 2003 et dont la demande fut refusée. En 2006, M. Singh a été frappé d’un anévrisme qui l’a paralysé. Plusieurs de ses partisans estimaient que le gouvernement canadien devrait permettre à M. Singh de rester au Canada pour des raisons de compassion et ont fait de leur mieux pour empêcher les agents de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) de l’expulser. Les reportages se centraient sur la deuxième tentative manquée de l’ASFC d’expulser M. Singh. Dans le reportage diffusé par Global on déclarait que M. Singh [traductions] « est entré au Canada illégalement », tandis que CTV de la C.-B. a rapporté que « pendant qu’il était ici illégalement, il a souffert un anévrisme. »

Media Watch a avancé que l’emploi du mot « illégalement » caractérise la situation de façon inexacte parce que bon nombre de réfugiés voyagent avec des faux documents par nécessité. Le groupe a conclu qu’étant donné que la loi canadienne dispose qu’il « ne peut être tenu coupable » pour avoir utilisé des documents du genre, Laibar Singh était au Canada « “ légalement ” pour toute la durée de son séjour […] de 2003 à 2007. » Le groupe Media Watch a également demandé que les télédiffuseurs diffusent un reportage expliquant davantage le processus de demande de statut de réfugié.

Le Comité national de la télévision générale et le Comité régional de la Colombie-Britannique du CCNR ont chacun étudié la plainte de leur ressort respectif et ont rendu une décision conjointe.

Les Comités ont souligné que les reportages étaient « complets, équilibrés et faisaient raisonnablement preuve d’empathie envers les difficultés vécues par le demandeur de statut de réfugié refusé », et qu’ils contenaient des détails comme le fait que M. Singh était arrivé avec des faux documents, qu’on avait refusé de lui accorder le statut de réfugié, qu’il avait souffert un accident cérébro-vasculaire et qu’on lui avait ordonné de quitter le Canada. Il y avait également dans ces reportages des entrevues avec des personnes qui se rangeaient des deux côtés de la question. Les Comités ont fait les commentaires suivants quant à l’emploi du mot « illégalement » :

[I]l [est] évident que l’emploi de l’adverbe « illégalement » n’a pas l’effet de déformer ou de déséquilibrer l’intégralité et l’exactitude des deux reportages de nouvelles. [...] Il est édifiant de considérer les mentions précises de la question de l’illégalité que contient ce document [la Convention relative au statut des réfugiés des Nations Unies qui est mentionnée par les plaignants]. La Convention aborde le principe central que les plaignants soulignent à bon escient, notamment la nécessité, d’ailleurs fréquente et anticipée, pour les réfugiés d’échapper à leur situation malencontreuse en fuyant avec de la documentation fausse ou forgée dont il est question au paragraphe 31(1), sous la rubrique « Réfugiés en situation irrégulière dans le pays d’accueil ». Dans l’article comme tel, on utilise également le terme « irrégulier » à deux reprises (ce qui est le terme utilisé par les rédacteurs internationaux de la Convention, lequel équivaut, selon les dictionnaires français, à « illégal »). [...]  Au Canada, la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés stipule, au paragraphe 122(1), que l’utilisation de faux documents pour entrer au Canada est une infraction susceptible de poursuite en justice dont la peine imposée dans les circonstances pertinentes est un emprisonnement maximal de quatorze ans. Pour ensuite tenir compte du cas particulier des réfugiés et des documents internationaux, à savoir la Convention relative au statut des réfugiés que nous mentionnons plus haut, la Loi stipule, à l’article 133, une immunité contre la poursuite judiciaire prévue par l’article 122, à savoir que « [L]’auteur d’une demande d’asile ne peut, tant qu’il n’est statué sur sa demande, ni une fois que l’asile lui est conféré, être accusé d’une infraction […] dès lors que [l’individu] est arrivé […] au Canada du pays duquel il cherche à être protégé et à la condition que l’infraction ait été commise à l’égard de son arrivée au Canada. » Autrement dit, il n’y a pas de changement quant à l’illégalité de la possession ou de l’utilisation à l’origine de faux documents, mais seulement une protection contre une poursuite judiciaire dans le cas d’une personne qui demande le statut de réfugié. Il est à remarquer, de plus, que si le statut de réfugié n’est pas conféré en bout de ligne, le caractère illégal de l’entrée au Canada demeure, tandis que la protection contre la poursuite judiciaire disparaît.

Les Comités ont également pris note de ce qui suit :

Bien qu’il soit juste que les signataires de Media Watch affirment que l’histoire des personnes qui demandent le statut de réfugié serait plus exacte si l’on expliquait qu’étant donné que les réfugiés craignent d’être poursuivis en justice dans leurs pays d’origine respectifs, ils sont souvent obligés de voyager avec des faux documents ou même aucun document, les télédiffuseurs n’ont pas choisi de présenter cette histoire-là dans ce cas-ci. Il s’agissait d’un récit différent, notamment celui du conflit entre les intérêts d’un individu qui cherche à rester au Canada pour des raisons de compassion et un gouvernement qui tâche de faire respecter ses lois et ses décisions. Il s’agissait également d’un récit sur l’efficacité des méthodes employées par les sympathisants pacifiques agitant leurs pancartes devant les employés de l’Agence des services frontaliers du Canada qui tentaient d’expulser cet homme souffrant, à savoir Laibar Singh, aux petites heures du matin. Il ne s’agissait pas du récit de la nature d’une demande de statut de réfugié ou du processus qui s’y rapporte, et encore moins de la sensibilité envers la terminologie appropriée qui sert aux analyses du genre. Chaque télédiffuseur avait le droit de choisir l’histoire à relater et ni l’un ni l’autre n’était aucunement obligé d’aborder chaque aspect de l’histoire qu’il a décidé de présenter, et encore moins chaque aspect d’une histoire qu’ils n’ont pas choisi de raconter. Les télédiffuseurs n’étaient pas non plus tenus, en vertu d’un principe général, d’éduquer l’auditoire quant aux détails sur les questions d’ordre procédural qui auraient pu être des éléments matériels dans le reportage d’une autre question.

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