Bien que l’humour de mauvais goût soit toléré, le langage indûment grossier et les descriptions indûment sexuellement explicites dépassent les bornes, selon le Conseil canadien des normes de radiotélévision

Ottawa, le 9 juin 2004 - Le Conseil canadien des normes de radiotélévision (CCNR) a publié aujourd’hui trois décisions au sujet de trois épisodes particuliers de l’émission matinale Forbes and Friends diffusée sur les ondes de CJAY-FM (Calgary) en 2003. Bien que le Comité régional des Prairies n’ait pas trouvé d’infractions au code dans l’épisode portant sur des personnes fictives souffrant du syndrome de Tourette, il a trouvé que les deux autres épisodes, l’un traitant de « traductions » chinoises et l’autre des circonstances entourant l’affaire de viol Kobe Bryant, ont contrevenu aux dispositions du code qui interdisent la diffusion de langage indûment grossier et injurieux d’une part, et de contenu indûment sexuellement explicite d’autre part.

Pendant le premier épisode, diffusé entre 8 h 00 et 9 h 00 le matin du 17 mai, CJAY a diffusé une émission pré-enregistrée qu’un plaignant a trouvé « cruelle et discriminatoire » aux dépens des gens qui souffrent du syndrome de Tourette. En examinant la parodie en question, intitulée « Des gens vraiment stupides atteints du syndrome de Tourette », qui mettait en scène des conversations entre personnes fictives souffrant du syndrome, le comité du CCNR a expliqué que, lors de l’évaluation de références à des handicaps physiques, le CCNR n’a généralement trouvé des infractions que lorsque le diffuseur se moque du groupe handicapé ou lui attribue des caractéristiques stéréotypiques négatives. En ce qui concerne la parodie en question ici, le Comité régional des Prairies a conclu que :

Dans l’affaire présente, le Comité admet que l’ « humour » était sans doute centré sur des personnes atteintes du syndrome de Tourette, mais pas nécessairement de façon exclusive, dans la mesure où une partie du commentaire ne visait simplement que les gens jugés « stupides ». De plus, le Comité a compris que les références au syndrome de Tourette n’ont pas touché les symptômes de tics moteurs ni les problèmes de mouvement, et se sont limitées à un aspect du syndrome, soit la coprolalie, qui n’affecte qu’un faible pourcentage des personnes atteintes. De plus, la coprolalie, ou la tendance d’une personne à laisser échapper des expressions socialement inacceptables ou taboues, n’est pas un facteur obligatoire d’un diagnostic positif du syndrome de Tourette. Ceci dit, le Comité considère le sketch comme un exemple regrettable d’usage du microphone pour s’amuser aux dépens des gens affectés d’un handicap mental. C’est un coup bas mesquin et gratuit, que le Comité ne trouve cependant pas « massacrant », pour utiliser la terminologie de la décision CHFI. Par conséquent, il voit l’émission comme une affaire de mauvais goût, qui passe très près des bornes, mais sans les dépasser. Le Comité juge donc qu’il n’y a pas eu d’infraction à l’Article 2 dans cette affaire.

Le Comité est arrivé à une conclusion semblable dans son étude d’une autre parodie qui a été diffusée pendant la même émission, le 11 août 2003. L’animateur de l’émission y a reçu un appel bidon d’un certain M. Wong qui offrait d’aider les animateurs à apprendre des expressions en chinois. Les « traductions » avancées par M. Wong étaient en anglais, mais prononcées de façon à ressembler à du chinois. Un plaignant a déclaré que le sketch était dégradant pour la collectivité chinoise. Le Comité a trouvé que

dans le cas présent, le Comité conclut que l’humour n’est ni profond ni mesquin. Il utilise principalement la méthode relativement légère souvent appliquée dans l’humour dirigé vers les ethnies, qui est celle de parler avec un accent. Bien que cet artifice soit généralement employé pour laisser l’impression que la personne ou le groupe visés sont inférieurs, la raison est parfois que la personne ou le groupe sont simplement différents. Le Comité croit que c’est le cas dans l’affaire présente. Le Comité considère que la collectivité chinoise n’est pas rabaissée, moquée ou marginalisée. Elle est certainement l’objet d’humour, mais pas sur des bases déclarées ou même sous-entendues d’inadéquation, de faiblesse ou d’échec.

Bien que le Comité n’ait pas trouvé d’infraction à la disposition traitant des Droits de la personne, il a jugé que l’usage de l’expression « f***ing super » dans le dialogue humoristique constitue une infraction à l’article 9 du Code de déontologie de l’ACR qui interdit l’usage de langage indûment grossier et injurieux.

Le dernier épisode, diffusé le matin du 10 octobre, contenait une discussion qui commentait et donnait des détails sur le viol prétendument commis par le joueur de basket-ball américain Kobe Bryant. Un plaignant a trouvé le contenu de ce dialogue « humoristique », ainsi que la blague à propos d’un ivrogne confus et la parodie d’une annonce de shampooing fictive (toutes deux contenant des connotations sexuelles), inappropriés et trop explicites pour les ondes. Bien que le Comité considère que la blague tout comme la parodie étaient en fait « bien loin d’être explicites », il a jugé que la discussion au sujet de Bryant et de son accusatrice était indûment sexuellement explicite.

En ce qui a trait à le première question, le Shorter Oxford English Dictionary définit le sens du terme « explicite » qui intéresse le Comité comme « exprimant distinctement tout ce qui est signifié, ne laissant rien de sous-entendu ou suggéré; non ambigu; clair. » Bien qu’il soit évident que l’usage seul du verbe « violer » puisse être vu comme clair et non ambigu, ce n’est pas dans ce sens que le Comité comprend l’intention des codificateurs quand ils utilisent le terme « explicite ». Le comité estime que les codificateurs voulaient dire explicite dans le sens descriptif, complet, exprimant tout ce qui est signifié, ce qui veut dire plus que ce que le verbe seul peut exprimer. En effet, il ne serait pas très logique que l’emploi d’un verbe seul, si peu équivoque soit-il, soit perçu comme étant « explicite ». On visait en fait le développement inutile et excessif sur ces bases, la description « indûment explicite », dans ce cas, d’activités sexuelles.

En appliquant cette définition aux mots « Il la saisit par le cou des deux mains, ce qui est jeu irrégulier, la retourna et la pencha sur le fauteuil et la viola », le Comité juge que le diffuseur a été « indûment sexuellement explicite ». Si l’animateur s’était limité à dire que Bryant avait violé la personne qui l’accuse, cela n’aurait presque certainement pas posé de problème. Il a choisi, cependant, de présenter le viol (si viol il y a eu – cette affaire est toujours devant la Cour au moment de cette décision) en quatre étapes, ce qui dépasse les limites énoncées par l’Article 9 du Code de déontologie de l’ACR.

Le Comité a aussi appliqué l’article 7 du Code concernant la violence, c’est-à-dire la question de la glorification de la violence faite aux femmes, à la discussion sur Kobe Bryant et n’a trouvé aucune infraction au Code. Il a expliqué qu’ « il y a eu des tentatives d’humour mais aucune ne sanctionnait la violence faite aux femmes » et que « l’humour lui-même tournait autour de questions de consentement et de faits qui sèment des doutes à ce sujet (d’après les journaux) mais que rien ne visait un aspect quelconque de la violence faite aux femmes. »

Les radiotélédiffuseurs privés canadiens ont arrêté des codes qui constituent les normes du secteur concernant l’emploi de stéréotypes sexuels, la présentation de violence et le traitement de questions à valeur morale, tels les droits de l’homme, sur les ondes, et ils s’attendent que leurs collègues les respectent. Ils se sont aussi dotés d’un organisme d’autoréglementation, le CCNR, qu’ils ont mandaté de veiller à l’administration de ces codes de responsabilité professionnelle. Le Conseil a par la suite été chargé de veiller également au respect du code de déontologie journalistique adopté par l’Association canadienne des directeurs de l’information radio-télévision (ACDIRT). Plus de 530 stations de radio et de télévision et services spécialisés, d’un bout à l’autre du Canada, sont membres du Conseil.

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Toutes les décisions du CCNR, les codes, les liens vers les sites Web des membres et d’autres sites Web, ainsi que des renseignements pertinents sont affichés sur son site Web à www.ccnr.ca. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec la présidente nationale du CCNR, Mme Andrée Noël, ou le directeur exécutif du CCNR, M. John MacNab.